Qu’elle soit conclue avec un cadre ou un non cadre, la convention de forfaits en jours sur l’année ne peut être réservée aux salariés disposant d’une autonomie « dans l’organisation de leur emploi du temps » (art. L. 3121-58, C. trav.).
La Cour de cassation vient de rendre, pour la première fois, deux décisions sur l’articulation entre l’organisation collective de l’entreprise et l’autonomie dont disposent les salariés en forfait jours.
Sans surprise sur le principe, elle décide que l’autonomie du salarié ne peut être synomyne d’une totale indépendance (Cass. soc., 2 févr. 2022, n° 20-15.744).
Un tel principe avait déjà été affirmé s’agissant des forfaits annuels en heures (Cass. soc., 2 juill. 2014, n° 13-11.904). Le salarié en forfait annuel en jours ou en heures reste un salarié et n’est pas cadre dirigeant.
Si le principe est clair, les marges de manoeuvre dans l’application et les modalités de l’organisation du forfait en jours sont plus délicates à définir.
Il a déjà été jugé, à plusieurs reprises, que le forfait en jours est incompatible avec l’obligation de respecter un planning (Cass. soc., 23 juin 2019, n° 02-14.861).
Dans l’arrêt du 22 février 2022, la Cour de cassation valide pourtant le fait pour un employeur (une clinique vétérinaire) « d’imposer un calendrier en jours de travail en fonction des contraintes liées à l’activtié [de l’entreprise] pour les rendez-vous des propriétaires d’animaux, tout en laissant la salariée organiser, en dehors de cette contrainte, sa journée de travail comme bon lui semblait et qu’elle était libre de ses horaires et pouvait organiser ses interventions à sa guise« .
La portée de cet arrêt, non publié et opérant une distinction (jours imposés / liberté totale des horaires), est incertaine. Elle tient surtout aux circonstances de l’affaire, l’employeur ayant tout fait pour conserver le salarié à son service, y compris dans l’organisation du temps de travail alors même que l’activité de la clinique ne s’y prétait semble-t-il pas.
Un autre arrêt récent valide l’obligation faite à certains salariés d’être présents à une heure donnée (la fermeture de l’entreprise) (Cass. soc., 15 déc. 2021, n° 19-18.226) :
Il faut ainsi opérer une distinction entre le fait :
- d’imposer au salarié en forfait annuel en jours (ou en heures) un planning rigoureux et des tranches horaires de présence (contradictoires avec la logique du forfait)
- d’imposer, à certains salariés, une présence à une heure donnée, contrainte qui, à elle seule, ne serait pas contraire à l’autonomie.
Là encore, tout est question d’espèce. La nature des contraintes, leur répétitivité ne doit pas avoir pour effet d’enlever au salarié l’autonomie inhérente au bénéfice du forfait en jours.